vendredi 9 février 2018

L'attente

C’est en forgeant qu’on devient forgeron, dit le dicton, et l’année qui vient de s’écouler m’a permis d’en éprouver toute la pertinence. Non que je sois devenu un « forgeron » professionnel, une expérience ne suffit pas. Mais j’ai en tout cas appris et retenu quelques leçons de l’aventure, car c’en est une, qui consiste une fois un manuscrit terminé à l’envoyer ensuite à une série d’éditeurs.

La rédaction d’un manuscrit n’est pas la fin du processus. Certes, écrire un roman d’environ trois cents pages demande efforts, constance, rigueur, patience. Et quand enfin on écrit le dernier mot, on pense naturellement être arrivé à la fin du voyage, comme le marin qui aurait longtemps vogué seul sur l’océan et qui apercevrait la terre. On se dit que le plus dur est fait. Il reste bien entendu les relectures, les corrections, plus ou moins importantes, et qui prennent plus ou moins de temps, selon la façon dont on écrit. Personnellement, je ne passe jamais à la phrase suivante tant que je ne suis pas à peu près satisfait de la précédente. Mes textes une fois bouclés demandent relativement peu de corrections — quelques fautes ou coquilles qui échappent à ma vigilance, ou tournures à revoir, mais rarement de remaniement profond.

On y est, donc. Et l’on n’a plus qu’une seule idée en tête, c’est envoyer le bébé aux grands manitous de l’édition. Sûr qu’ils vont le lire, au moins, l’aimer, rien n’est certain, mais c’est leur métier après tout : ils le liront…

Que nenni. Les éditeurs reçoivent des monceaux de manuscrits. Qu’ils ne lisent pas, ou très exceptionnellement. Et c’est après avoir reçu des monceaux de lettres de refus que l’auteur en herbe commence à se poser des questions, et à se renseigner : pour qu’un éditeur consente éventuellement à se pencher sur votre prose, si vous n’avez pas la chance d’être recommandé, parrainé, ou si vous n’avez pas déjà un nom (chanteur, acteur, journaliste, que sais-je), vous devez lui « vendre » votre texte. Même si c’est difficile de parler du roman qu’on vient d’écrire et de vendre sa création.

La principale leçon est là : une fois la rédaction d’un manuscrit terminée, l’auteur qui n’a pas encore d’éditeur n’a fait que la moitié du chemin. Il lui faut encore, et c’est souvent le plus difficile, rédiger ce qu’on appelle un « argument » ; c’est-à-dire quelques paragraphes qui donnent les clés de lecture : le contexte, ce qui est dit, ce qui n’est pas dit mais qu’il faut comprendre, l’architecture du roman. Tout ceci synthétisé en une page maximum. Cet argument doit s’insérer dans la lettre de présentation que vous devez joindre au manuscrit, dans laquelle vous devez en quelques lignes également vous présenter, vous, l’auteur en herbe.

Et puis le synopsis. Il faut rédiger un synopsis, c’est-à-dire le résumé de votre histoire (sans tout dévoiler, évidemment). Pour faire simple, entre l’argument et le synopsis, vous devez donner à l’éditeur la quatrième de couverture du roman. Sans ces deux éléments (trois avec une bonne lettre de présentation), le manuscrit risque de croupir sur les étagères pendant quelques mois avant d’être renvoyé sans même avoir été feuilleté.

Lors de mes premiers envois, je n’avais pas travaillé cet aspect-là : mon synopsis était trop succinct, je n’avais pas écrit d’argument, et ma lettre tenait en trois phrases. J'ai mis presque un an pour comprendre et refaire les choses correctement. D'autres éditeurs ont reçu mon manuscrit la semaine dernière : on verra si j’ai bien tout intégré.

C’est reparti pour quelques semaines d’attente.

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